Jeudi soir, Manchester United se déplace sur la pelouse de l'Ajax Amsterdam, pour le compte des 1/16ème de finale de l'Europa League. Petit zoom sur notre futur adversaire...


Pour beaucoup de supporters mancuniens, le terme Europa League a plus une connotation d'échec, de catastrophe, de punition, de déception, de désillusion. L'élimination de la plus prestigieuse des coupes face à Bâle laisse encore un sentiment amer dans l'esprit de tous les Red Devils. Mais la saison n'est pas finie, elle ne peut se finir là-dessus. La déception doit laisser place à un nouveau sentiment, un sentiment d'espoir qui doit forcer toute l'équipe et ses supporters à aller de l'avant. Et puis, jouer le grand Ajax, c'est tout sauf une punition. Et espérons que ça n'en sera pas une sur le terrain. Pas pour nous, en tout cas.

L'Ajax ? Qu'est ce que ceci ?

Le terme "Ajax" peut désigner quatre choses :

• Un héros de la mythologie Grecque, lors de la Guerre de Troie

• Un terme en informatique, dont je ne me risquerai pas à expliciter le principe ni la définition

• Un nettoyant pour vitres

• Un club de football

Comme je pense que vous n'êtes pas vraiment calés en informatique, ni vraiment en mythologie, et encore moins en ménage, on s'intéressera au club de football, c'est mieux. Signalons tout de même que c'est bien le héros Grec Ajax qui a donné son nom à l'équipe Hollandaise. C'est d'ailleurs lui qui figure sur l'emblème de l'équipe.

Présentation du club

L'Amsterdamsche Football Club Ajax, ou l'Ajax tout court (c'est moins barbare), est créé en 1900. C'est l'un des trois clubs traditionnels Hollandais, avec le PSV Eindhoven et le Feyenoord Rotterdam, qui sont par le fait les trois clubs les plus célèbres de l'Eredivisie. L'Ajax n'est jamais descendue depuis la création de l'Eredivisie (en 1956), elle compte 30 titres de champion des Pays-Bas, 18 Coupes des Pays-Bas, 4 Ligues des Champions, 1 Coupe de l'UEFA, 1 Coupe des Vainqueurs de Coupes, entre autres. Autant dire que la vitrine est bien garnie. Le club évolue à domicile à l'Amsterdam Arena (50 000 places) depuis 1996.

Le rival sportif attitré de l'Ajax est bien sûr le PSV. Mais il existe aussi une certaine rivalité un peu plus traditionnelle avec le Feyenoord, basé à Rotterdam (un des plus grands ports marchands du Monde, considérée comme la ville du travail, de la besogne, là où Amsterdam est considérée comme la ville des arts aux Pays-Bas).

Un passé glorieux

Même si le club n'évolue pas dans le plus relevé des championnats, il n'en est pas moins que l'Ajax figure comme un club prestigieux, avec une histoire riche, aussi bien en sentiments qu'en trophées. Il est loin, le temps où le club, à ses débuts, ne disposait pas encore de terrain pour jouer (à cause de l'expansion de la ville d'Amsterdam). Il est loin le temps où le club évoluait en D3 Hollandaise, dans un petit stade pittoresque d'une ville dont je ne me risquerai pas à vous écorcher le nom, sans gradins et sans vestiaires (c'était le café d'en face qui faisait office de vestiaires).

Cette époque est bien lointaine, le club est parvenu à se faire une renommée, pas seulement sur la scène nationale, mais aussi et surtout sur la scène européenne, puisque l'Ajax est avec la Juventus et le Bayern l’un des 3 clubs à avoir réussi un triplé européen (Ligue des Champions, Coupe UEFA, Coupe des Vainqueurs de Coupe). Et cette renommée, le club se l'est bâtie en quelques décennies, et grâce à quelques générations dorées, une poignée de génies, un zeste de réussite (il en faut toujours) et surtout une bonne dose de talent.

Les années 1970’

Les premiers véritables succès du club se produisent aux débuts des années 1970. C'est l'époque de Sjaak Swart (recordman de matchs joués avec le club, 603 apparitions), de Ruud Krol, de Dick van Dijk, de Piet Keizer et bien évidemment de Johan Cruyff. Le tout sous la houlette de Rinus Michels, qui sera désigné par la FIFA "meilleur entraîneur du XXème siècle". Juste ça. Il faut dire que la philosophie du jeu tourné vers l'attaque que prône Michels correspond bien aux profils des joueurs. L'Ajax marque, marque, et marque encore. C'est ce qu'on a alors appelé "le football total". Les défenseurs participent aux actions de buts, les ailiers ont un rôle prépondérant dans les offensives, l'équipe attaque et défend à l'unisson, comme un bloc. On croirait voir l'Equipe de France à la Coupe du Monde 2010 (euh, tout bien réfléchi, non).

Le joueur allégorie de ce style de jeu si particulier est certainement Cruyff. Le génie Hollandais regroupe toutes les qualités : une palette technique stratosphérique, une vitesse évidente, et une vision du jeu à en faire jalouser un Xavi. Cruyff, c'est l'incarnation même du football total. Cruyff, c'est la connaissance parfaite du football. Cruyff, c'est aussi un buteur hors-pair (avec son compatriote de l'attaque, Keizer), c'est l'un des meilleurs buteurs de l'histoire de l'Ajax (190 réalisations en 240 matchs). Bref, Cruyff, c'est fort. La défense n'est d'ailleurs pas non plus en reste, puisqu'elle est menée à l'époque par Ruud Krol, qui restera comme l'un des tous meilleurs défenseurs que le club ait connu, et comme l'un des joueurs les plus fidèles.

Cette pléiade d'étoiles va évidemment faire gagner le club. C'est même un euphémisme de dire ça. L'Ajax ne gagne pas, elle écrase. 3 Coupes d'Europe d'affilée, en 1971, 1972 et 1973. Mais aussi 6 titres de champions entre 1966 et 1973. Le football total devient un exemple, une référence en Europe. Mais le plus dur n'est pas d'arriver aux sommets, c'est de s'y maintenir. Ce que l'Ajax réalise de fort belle manière, jusqu'au milieu des années 70, marqué par le départ de Michels et de Cruyff au FC Barcelone, ainsi que par le départ en retraite de Swart, celui-même qui répondra dorénavant au surnom de "Mister Ajax".

Les années 1980’

Si le début des années 1980 coïncide avec un pillage des meilleurs éléments de l'équipe, le club enregistre aussi le retour de Cruyff, légende de tout un peuple. Pour combler les nombreux vides laissés par les départs, l'Ajax mise sur une politique de formation et sur un centre qui a fait ses preuves. C'est ainsi qu'émergent des Wim Kieft, Franck Rijkaard, Gerald Vanenburg, Jesper Olsen et bien évidemment Marco Van Basten. Autant de joueurs qui viseront à reprendre des mains de Cruyff le flambeau incandescent du club pour en raviver la flamme. La philosophie du beau jeu, désormais marque de fabrique du club, imprègne cette nouvelle génération. Le club gagne le championnat en 1982, 1983 (avec 120 buts inscrits!) et 1985, sous la direction de Cruyff. Une animation offensive qui se trouve un serial buteur, j'ai nommé Van Basten. Entre 1981-1987, il aura marqué 152 buts en 172 matchs pour le club. Son départ pour l'AC Milan en 1987 est une perte évidente pour l'équipe. Mais une nouvelle fois, une nouvelle génération se prépare à entrer en scène.

Les années 1990’

Et ce que l'on peut dire de cette génération, c'est qu'elle n'a rien à envier à ses aînées. Avec un coach de caractère, Louis Van Gaal, qui va rapidement imposer son style, et surtout s'imposer, et avec de nouvelles pépites sorties tout droit du centre de formation, l'Ajax retrouve des couleurs sur la scène européenne. Elle gagne la Coupe de l'UEFA en 1992. Compétition qui verra se révéler un certain Dennis Bergkamp. A l'époque, Nikos Dabizas et Newcastle pouvaient encore dormir sur leurs deux oreilles. Mais pas pour très longtemps (oui oui, je veux parler de ce but, le but dans toute sa splendeur). Tout comme le PSV, qui s'empare des titres de champion au début des années 90'. Mais si Bergkamp quitte le navire en 1993, d'autres joueurs arrivent. Le Finlandais Litmanen hérite du mythique numéro 10, et deviendra l’un des joueurs fétiches du dispositif de Van Gaal. Mais il n'est pas le seul : Clarence Seedorf, Edgar Davids, Marc Overmas et un sinistre inconnu, Edwin Van Der Sar, pointent tous le bout de leur nez.

En 1994, le club est sacré champion, et gagne surtout la Ligue des Champions, contre le Milan AC, grâce à un but du jeune Patrick Kluivert. La saison suivante, l'Ajax perd en finale de la plus prestigieuse des compétitions face à la Juventus. Re-belote à la fin de la saison 1996-1997, toujours contre la Vieille Dame. Mais avec 1 Coupe de l'UEFA, 1 Ligue des Champions, et 5 titres de champions en une décennie, l'Ajax a retrouvé de sa splendeur, les années 90 restants comme parmi les plus prolifiques que le club ait connues, tant en terme de production de pépites, de jeu, que de trophées majeurs remportés.

Les années 2000’

Un zénith qui prépare un crépuscule, puisque les années 2000 sont sombres, le PSV remportant la majeure partie des titres nationaux. Petit clin d’œil sympatoche, la saison 2010-2011 pour l'Ajax est symbolique, tout comme celle de notre club. Alors que United remporte son mythique 19ème titre de champion d'Angleterre, l'Ajax remporte, sous les ordres de De Boer, son symbolique et évocateur 30ème titre de champion des Pays-Bas. Juste impressionnant !

L'effectif actuel

Fort heureusement, nous n'aurons pas à affronter Cruyff, Swart, Van Basten, Bergkamp ou Kluivert. Mais l'Ajax reste une équipe très difficile à manœuvrer, qui a toujours conservé cette philosophie du jeu à vocation offensive, véritable atout premier de l'équipe. Des buts, ils pourront en marquer. Un secteur offensif animé, où évoluent le très bon Theo Janssen (transféré de Twente cette saison, joueur intelligent, expérimenté, et dangereux sur coup de pied arrêté, mais qui sera vraisemblablement indisponible pour l'aller), le remuant Sulejmani, le dangereux Bulykin, le prometteur Lodeiro et le fantasme Eriksen, entre autres. Ce dernier sera certainement l'arme première des Rouges et Blancs, avec sa technique hors paire, sa capacité de dribble, sa lecture du jeu, sa précision, sa vivacité et sa maturité. Tout ça à 20 ans. Mais bon, est-ce encore utile de présenter le plus désiré des prodiges ?

Défensivement, le club est affaibli, amoindri avant de nous rencontrer. Le très talentueux Toby Alderweireld est de retour à l'entraînement, mais ne retrouvera certainement pas sa place dans l'axe pour nous affronter. Son compatriote de la défense centrale, Jan Vertonghen, sera lui bien présent. Grand et solide défenseur, très bon dans les duels, le capitaine de l'Ajax ne perd jamais la balle de vue, et n'hésitera pas à en découdre avec nos attaquants. Signalons aussi le latéral Van Der Wiel, qui rejoindra Valence à la fin de la saison. Dans les buts, le staff a misé sur l’ancien gardien numéro 2, Keneth Vermeer, pour succéder à Stekelenburg, parti cet été à la Roma. Ce n'est certainement pas le point fort de l'équipe, mais méfions-nous tout de même des gardiens à priori sans véritable talent, qui peuvent toujours nous écœurer (qui a dit Krul?).

Quelques chiffres et faits évocateurs...

• En 1918 et en 1996, l'Ajax a remporté le championnat en finissant invaincu.

• Sa plus grosse victoire remonte à 1931, et un joli 17-0 face à VUC.

• Sa plus grosse défaite à ce jour (donc avant de nous avoir affronté, gniark gniark), c'était un 2-16 face au Rapid de Vienne, en 1928.

• Le joueur le plus capé de l'équipe est Sjaak Swart (603 matchs). Pas de quoi en faire jalouser Giggs, mais c'est déjà pas mal. Il a aussi marqué 217 buts avec le club, ça aussi c'est pas mal.

• En 1972 et 1973, l'Ajax gagne le championnat avec une différence de +100.

• Avec 111 buts en 159 matchs, Luis Suarez restera le meilleur écureuil de l'histoire du club.

Moralité

Fini le complexe de supériorité (car chez nous, il existe). United doit se donner à fond dans cette compétition, dans laquelle il s'inscrit comme un favori. C'est après tout la dernière coupe dans laquelle le club est engagé. Mais notre premier adversaire n'est clairement pas un cadeau, et gageons que les Hollandais feront tout leur possible pour nous mettre des bâtons dans les roues. Ils ont les arguments offensifs pour nous inquiéter. Comme d'habitude, ce sera l'équipe qui en voudra le plus qui l'emportera. Après avoir été humiliés, déchus, vaincus en Champions League, espérons que nos joueurs voudront retrouver de la légitimité sur la scène européenne. Une rédemption ? C'est à peu près ça...

Article rédigé avec la précieuse collaboration de YBthebest.



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