"Je veux jouer la Coupe du Monde"

Jonny Evans, le défenseur central de Manchester United et de l'équipe d'Irlande du Nord se confie. Il revient sur son premier but en équipe nationale, sur le succès de son équipe dans les éliminatoires de la Coupe du Monde 2010 et sur son souhait de participer à celle-ci. Interview.


Versée dans le groupe 3 en compagnie de la République tchèque, l'Irlande du Nord et son 1,75 million d'habitants n'avait pas, à priori, la faveur des pronostics. Mais, cinq journées plus tard, les hommes de Nigel Worthington font toujours la course en tête. L'un des artisans de cette formidable réussite n'est autre que le jeune Jonny Evans. Le défenseur central de Manchester United, qui vient tout juste d'inscrire son premier but en sélection à l'occasion de la victoire (3 à 2) de son équipe sur la Pologne, se confie et parle de son avenir avec sa sélection, ses attentes et son parcours avec United.

Jonny Evans, avant tout, félicitations pour votre victoire sur la Pologne. Quel effet cela fait-il de se retrouver en tête de son groupe ?

Nous sommes fous de joie. Ce n'est qu'en voyant nos supporters fêter la victoire que nous avons réellement compris l'ampleur de ce que nous venions de réaliser. Les gens dansaient et lançaient leurs maillots au-dessus de leur tête ! C'était vraiment une belle soirée. Ces dernières années, nous avons battu beaucoup de grandes équipes, chez nous à Belfast, mais j'ai parfois l'impression que ces exploits passent un peu inaperçus. L'Espagne, la Suède, l'Angleterre et le Danemark sont venus à Windsor Park... et sont repartis les mains vides. Désormais, il faudra ajouter la Pologne à cette liste.

Votre stade de Windsor Park est devenu une véritable forteresse. En club, vous avez pris l'habitude d'évoluer dans une enceinte bien différente. Pensez-vous que le fait de jouer dans un stade relativement petit, où l'atmosphère est souvent électrique, constitue un avantage pour vous ?

Sans aucun doute. Les autres équipes n'aiment pas venir jouer ici, c'est bien connu. Vous avez raison de dire que Windsor Park n'a rien à voir avec Old Trafford, mais ce n'est pas une mauvaise chose. Je pense que le choc culturel joue souvent en notre faveur. Ces dernières années, beaucoup d'équipes ont abandonné leurs stades traditionnels pour s'installer dans de grandes enceintes. Les résultats n'ont pas toujours été à la hauteur de leurs espérances. En Angleterre, l'exemple de Southampton est révélateur (en quittant le Dell pour s'installer à St Mary's, les Saints ont perdu leur place en Premier League et se débattent actuellement dans les bas fonds du Championship). Dans notre esprit, Windsor Park représente une arme de plus dans notre arsenal. C'est un avantage de jouer ici et nous comptons bien l'exploiter à nouveau, mercredi contre la Slovénie.

Votre présence en tête de la poule en a surpris plus d'un. Quel est le secret de votre réussite ?

J'allais vous dire que nous sommes le genre d'équipe que les gens n'aiment pas voir jouer mais, en y réfléchissant bien, je crois que c'est exactement le contraire. Nous mettons un tel rythme dans nos matches qu'il se passe toujours quelque chose avec nous. Même si nous aimons réduire les espaces et mettre la pression sur le porteur du ballon, nous sommes toujours très corrects. Nous sommes avant tout une équipe honnête, qui joue le jeu sans artifice.

Vous avez manqué de peu la qualification pour l'Euro 2008, au terme d'une campagne éliminatoire riche en émotions. L'Irlande du Nord doit-elle participer à un grand tournoi pour franchir un palier ?

J'aimerais beaucoup participer à la Coupe du Monde, mais je sais que ce rêve sera très difficile à réaliser. Je ne suis pas de ceux qui pensent que notre tour est enfin venu. Je vous l'ai dit, j'aimerais vraiment être du voyage en Afrique du Sud, mais le succès d'une équipe comme la nôtre ne peut pas se mesurer au nombre de qualifications acquises. Nous n'étions pas présents à l'Euro, mais nous avons fait honneur à notre pays. Au terme des éliminatoires, tout le monde parlait de nouveau de l'équipe nationale en bien. Personnellement, je ne considère pas cela comme un échec, car nous avons tout donné.

Vous êtes trop jeune pour vous souvenir des sélections nord-irlandaises qualifiées pour Espagne 1982 ou Mexique 1986. Quels sont vos premiers souvenirs de la Coupe du Monde de la FIFA ?

Pour moi, tout a commencé avec France 1998. Je me souviens avoir regardé le match d'ouverture entre le Brésil et l'Ecosse. J'ai suivi pas mal de rencontres, cette année-là. J'ai vu Ronaldo marquer des buts extraordinaires et j'ai vu Zidane entrer dans la légende. Evidemment, à cette époque, je n'imaginais pas que je pourrais un jour participer à une telle compétition. Ce serait vraiment fantastique, mais nous en sommes encore très loin.

Parlons un peu de Manchester United. Vous avez déjà disputé près de 30 matches cette saison, alors que vous êtes en concurrence avec des joueurs comme Rio Ferdinand et Nemanja Vidic, considérés comme deux des meilleurs défenseurs au monde. Vous devez être satisfait.

Ils sont phénoménaux, mais je n'ai pas vraiment le sentiment d'être en concurrence avec eux. J'ai beaucoup joué cette saison, mais je ne me fais pas d'illusions : quand ces deux-là sont en pleine possession de leurs moyens, ils passent toujours avant moi. J'ai encore quelques années devant moi pour changer la donne mais, en attendant, j'ai la chance d'apprendre mon métier aux côtés de deux défenseurs d'exception. Ferdinand et Vidic sont très différents à bien des égards, mais ils ont une chose en commun : l'efficacité.

Avec eux, vous avez contribué à établir un record de 14 matches consécutifs sans encaisser le moindre but. Comment avez-vous vécu cette superbe série ?

Je suis très fier d'avoir contribué à cet exploit. J'étais sur le terrain quand notre invincibilité défensive a pris fin et je peux vous dire que nous étions très déçus, d'autant que c'était un but évitable. Mais avant cela, nous avons pris grand plaisir à faire durer cette série le plus longtemps possible. C'est une belle réussite collective, dont nous pouvons être fiers.

Les récentes contre-performances de Manchester United sont-elles passagères ou vos fans ont-ils des raisons d'être inquiets ?

Je ne crois pas qu'il faille être pessimiste. Nous sommes toujours en position de force. En plus, la trêve internationale arrive au bon moment pour nous. Depuis la Coupe du Monde des Clubs en décembre dernier, nous n'avons pratiquement jamais pu souffler. Dans ces conditions, un changement de décor et une petite pause ne peuvent que nous faire du bien.

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