Un rêve éveillé, c'est ce que l'on a tous l'impression d'avoir vécu en cette douce après-midi de fin Août. Un sourire figé sur le visage, comme le sentiment que ce qui s'est passé sur la pelouse d'Old Trafford il y a quelques heures, marquera nos esprits, à vie. Une correction infligée à nos ennemis Gunners qui sonne comme une évidence pour certains, au vu des difficultés rencontrées par le club londonien ces temps-ci, mais qui n'en reste pas moins un exploit de taille, un exploit magique. Nous avons marqué à huit reprises, face à un Arsène dépité, dans un match qui avait des saveurs de la nette victoire acquise contre ces mêmes Gunners, il y a dix ans de cela (6-1).


Le théâtre des rêves - il n'a jamais aussi bien porté son nom - nous a encore offert hier de quoi chanter les mérites de notre équipe. Les Citizens faisaient du bruit dans les recoins de la ville, quelques minutes avant le coup d'envoi. Ils venaient de battre sèchement Tottenham à White Hart Lane (1-5), et ils étaient alors logiquement premiers de Premier League. Avant d'aborder la rencontre, il n'était donc pas question pour nous de rater cette réception d'un Arsenal plus qu'amoindri. Orphelins de Fabregas et Nasri, partis récemment, ainsi que de nombreux expulsés et joueurs blessés, il était évident que tous les voyants étaient au vert concernant une victoire de notre part.

PREMIÈRE PÉRIODE :

Loin de prendre de haut cette formation d'Arsenal, Ferguson alignait un système identique à celui de lundi dernier. Un 4-4-2 à vocation très offensive, comme un signe du coach, qui est celui de vouloir se montrer plus productif en terme de jeu que la saison dernière. Comme prévu, l'activité principale était à mettre à notre actif, et ce dès le début de rencontre. Les enchaînements entre nos milieux et nos attaquants étaient déjà impressionnants et reflétaient toute la force de notre jeu collectif, qui avait été entrevu par intermittence lors des deux premiers matchs. Sous l'impulsion d'une paire Rooney-Welbeck très mobile, nos transmissions s'en retrouvaient sublimées et les jeunes défenseurs Gunners étaient déjà à la peine.

Il ne nous fallut pas beaucoup de temps pour nous montrer dangereux. A la 7ème minute de jeu, Danny, lancé dans la profondeur, tenta un petit piqué du gauche intelligent mais mal ajusté, qui fila un bon mètre à côté des buts de Szczesny. Mais l'avertissement était là, le jeune anglais est un joueur qui adore décrocher mais qui arrive aussi très bien à prendre la profondeur. C'était clairement lui l'homme disponible de ce début de match, aspirant les ballons de ses partenaires et donnant beaucoup de mal à une défense statique qui perdait la tête face à ses mouvements constants. La deuxième occasion fut la bonne pour lui. Héritant d'une louche magnifique d'Anderson dans la surface, il place une petite tête pleine de finesse qui se logea dans les filets, laissant le gardien polonais sur ses appuis, impuissant. Ce n'était que le début du cauchemar pour lui, et ce n'était que le début d'une très bonne prestation de notre milieu brésilien. Dans la continuité de ces dernières semaines, il se révèle comme le milieu axial le plus performant du début de saison, loin des performances irrégulières de 2010. Il montre au coach et aux supporters qu'il est capable de prendre la relève d'un Scholes. Sa petite balle sur le but n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle du "ginger prince" contre le Milan, en 2007. Encore hier, sa prestation fut solide, son duo avec Cleverley n'est peut-être pas celui qui aide le plus la défense, mais il apporte une certaine fluidité à notre jeu qui ne peut qu'être appréciable (et appréciée, je l'espère).

Wenger baissait la tête, encaissant difficilement la triste réalité : nous étions en train de donner une leçon à Arsenal. Nous aurions d'ailleurs pu doubler la mise quelques secondes plus tard, par l'intermédiaire de Smalling parfaitement lancé sur la droite, qui vit sa frappe du gauche fuir le cadre. Et pourtant, tout semblait relancé quand à la terrible 26ème minute, Evans accrochait Walcott dans la surface, l'international anglais obtenant le penalty après sa chute. Les yeux étaient tous rivés sur Van Persie, côté londonien, et sur De Gea, côté mancunien. Le portier espagnol essuie les critiques répétées de tout le royaume depuis son arrivée, et comme pour répondre à tout cela, il sortit un arrêt décisif face au hollandais. Décisif car il maintenait l'équipe en tête, mais encore plus décisif quand, une minute plus tard seulement, Young clôturait ces quelques minutes de folies d'une frappe enroulée magistrale dans la lunette. Loin de faire notre force depuis le départ de Ronaldo, les frappes lointaines semblent retrouver un peu de vie dans notre jardin depuis l'arrivée d'Ashley. Cet enroulé du pied droit est l'un des gestes de la rencontre, qui ne laissa strictement aucune chance au gardien. Young, très remuant sur son aile, continue sa bonne entame de championnat. Déjà décisif sur ses passes, il se montre aussi buteur pour la première fois de sa carrière à United, devant the Stretford End, comme pour dire : "Hello, it's me". Apportant constamment des solutions sur le côté, il semble inépuisable, capable aussi de remplacer Evra lors de ses montées. Ce n'est peut être pas LA recrue que tout le monde attendait, mais c'est une recrue efficace. On n'en demande pas plus, et pourtant, il donne plus...

Les minutes se suivaient et ne se ressemblaient pas dans ce match, car, après un coup de génie, c'est un nouveau coup dur qui intervint. Sur une balle en profondeur Welbeck se claqua. Il fut donc obligé de quitter prématurément ses partenaires et offrit donc la possibilité à Chicharito d'entrer en jeu. Et ce claquage survenu quelques instants seulement après une grosse faute d'Arshavin sembla avoir perturbé Howard Webb, qui aurait dû, selon toute vraisemblance, exclure le russe pour un deuxième carton jaune mérité. Mais nous n'avions même pas le temps d'en discuter ou de protester, car tout s'enchaînait à une vitesse irréelle dans cette rencontre. Premier coup-franc du match pour Rooney, premier but! Une combinaison entre lui et Young qui donnait lieu à un enroulé tout en finesse, que Szczesny ne put que dévier dans le petit filet. Un classique de coup de pied arrêté, à voir et à revoir, symbole de la simplicité et de la beauté de ce sport. Un geste, il suffit d'un petit geste d'un grand joueur pour vous illuminer une journée. Ce fut le cas. Rooney arborait un sourire fier, l'anglais survolait la rencontre, des ailes commençant à lui pousser sur le dos. Il se sentit pris d'un vent de confiance (ou de folie, au choix) et tenta une frappe audacieuse de 55 mètres mais pas inquiétante pour le gardien.

A 3-0 la cause semblait entendue. Même Wenger sur son banc ne donnait aucun signe de vie, d'enthousiasme. C'est peut-être cette espèce de comportement amorphe de la part de nos adversaires qui conduisit nos défenseurs à la faute. D'un brin de maladresse et d'un brin de suffisance, à quelques secondes de la pause, Evra manqua complètement un dégagement du pied droit, qui permis à Rosicky de trouver Walcott pour la réduction du score, d'une frappe puissante qui passa entre les jambes de De Gea. Une petite erreur de l'espagnol qui ne reflétait pas du tout sa rencontre (même si beaucoup se précipiteront sur cette erreur pour le pointer du doigt). Auteur de plusieurs arrêts de grande classe et surtout héros décisif sur le penalty, il monte en puissance au fur et à mesure qu'il joue, s'acclimatant de plus en plus au football anglais. Football anglais particulier, puisque malgré une nette domination dans le jeu de notre part, nous rentrions aux vestiaires avec un avantage de "seulement" deux buts, qui laissait encore quelques espoirs chez nos adversaires.

DEUXIÈME PÉRIODE :

Espoirs qui ne furent pas loin de partir en fumée dès la reprise, quand Young, encore lui, tenta de creuser un peu plus l'écart, tombant sur un Szczesny impérial. Mais, bien que nous ayons directement repris notre domination, les Gunners se montraient eux aussi dangereux à quelques reprises, profitant d'un certain laxisme de notre défense et d'un surplus d'espaces laissés au milieu de terrain. Finalement, il fallu attendre la 64ème minute, et un nouveau geste de grande classe de notre numéro 10, pour voir l'écart s'accentuer. D'une combinaison similaire à celle du troisième but, il enroula de nouveau sa frappe, qui prit le gardien à contre pied et qui alla se loger dans le coin droit de la cage. La différence était faite, les dernières volontés des Gunners n'existaient plus et nous nous apprêtions donc à faire cavalier seul pour la dernière demi-heure.

Signe de l'abandon d'Arsenal, deux minutes après le deuxième but de Rooney, Nani vint lui aussi ajouter son nom au tableau d'affichage. L'anglais étant à nouveau pleinement impliqué dans l'action, attendant le bon moment pour lancer le portugais dans la profondeur. Avec toujours le même sang froid et la même qualité technique qui caractérise notre ailier droit, Nani fit un petit piqué au-dessus d'un Szczesny désabusé, qui regardait, comme 75.000 personnes, la balle finir sa course dans les buts. Flottant dans les airs, balayant les chants londoniens et poussant à l'exaltation les fans locaux, pour ce qui semblait être des secondes éternelles. 5-1, le score était de plus en plus sévère, et il restait du temps, beaucoup de temps. Tout le monde sentait le succès historique arriver et nos joueurs, conscients de devoir apporter ce bonheur aux supporters, s'employaient à percer à nouveau une défense dépassée.

Le regard du coach français en disait long, comme s'il acceptait cette infériorité flagrante de ses joueurs, qui ne faisaient plus que figuration dans un match où seul le rouge semblait se présenter aux yeux du monde entier. Ferguson profitait d'ailleurs de cette avance définitive pour faire entrer deux joueurs en manque de temps de jeu cette saison, Giggs et Park. Mais celui qui continuait à se distinguer n'était autre que Wayne Rooney, qui ne passait pas loin du triplé avec un petit ballon dosé à la perfection qui s'en alla mourir sur le poteau droit, les filets se refusant à la pourtant majestueuse galanterie du touché de balle de l'anglais. Ils ne mirent cependant pas longtemps à trembler à nouveau, quand, quelques secondes plus tard, Park orchestra une jolie attaque, se servant de Young comme point de relais avant de tromper tout son monde d'une frappe croisée du gauche, qui termina sa course dans le petit filet. Comme toujours dans ce match, tout paraissait si simple, la qualité technique ne devenant plus qu'un lointain obstacle que les mancuniens maîtrisaient en tout point. L'après-midi était destinée à voir la ville de Manchester écraser celle de Londres, et rien ne pouvait plus désormais empêcher la machine de continuer sa folle prestation.

Pas même le but de Van Persie, assez anecdotique, survenu à la 74ème minute, qui reflétait malgré tout encore quelques signes de suffisance de la part de notre back four. Face à une défense éparpillée, le néerlandais profita d'une remise de la tête de Ramsey pour ajuster De Gea à bout portant, d'une volée du gauche imparable. Une petite zone d'ombre à cette victoire écrasante, les quelques carrences défensives de notre part, à mettre surtout à l'actif d'un Evra dépassé sur son côté gauche. C'était pourtant lui, le français, le capitaine et le joueur le plus expérimenté de notre équipe au coup d'envoi. Mais sa tendance à être aspiré par le jeu offensif faisait défaut à notre solidité défensive, qui s'en retrouvait perturbée, au point de voir un Arsenal pourtant très fébrile inscrire deux buts à Old Trafford et obtenir un penalty. Nul doute que Ferguson devra prendre en compte ces passages à vide pour éviter de voir de telles erreurs se reproduire à l'avenir.

Cette réduction au score n'enlevait pas toute la frustration présente côté adverse et en cinq minutes, les voilà qu'ils rendaient leur match encore plus chaotique qu'il ne l'était déjà. Jenkinson, auteur d'une faute grossière, écopa d'un second carton jaune, et Walcott poussa Evra dans la surface de réparation, offrant un penalty à United et donnant la possibilité à Rooney de réaliser le hat trick. Tout en concentration, les yeux rivés sur le ballon, sur les buts, éclipsant toute pression extérieure, il envoya une frappe qui scellait son excellente prestation. 7-2, les caméras n'avaient d'yeux que pour la joie enfantine de l'anglais et le scoreboard, reflétant la différence évidente entre les deux clubs. Un coup du chapeau pour Wazza, trois coups de génie, même plus, qui montre que le meilleur joueur de sa nation est bel et bien de retour. Il a pris une dimension encore plus importante au sein du club depuis 2011. Buteur, il l'est toujours, mais surtout, si essentiel à la construction. Tous les ballons qu'il touche deviennent dorés, la prestation la plus anodine pour lui est une prestation équivalent à un 10/10 chez n'importe quel autre joueur. Il ne surprend plus, il épate et nous laisse pantois devant tant de talent. Mais ce ne fut pas le seul aujourd'hui, nous n'en avons pas beaucoup parlé car ils ont eu peu d'interventions à faire, mais le trio Evans – Jones – Smalling fut à nouveau au top de sa forme. De manière personnelle, je donnerais le prix d'homme du match à Chris, qui a tout simplement fait la rencontre parfaite sur son aile. Lui non plus ne surprend plus, il n'est pas qu'un joueur polyvalent capable de jouer dans l'axe et sur le côté, il est un arrière droit de classe mondiale. Quant à Jones et Evans, ils ont à nouveau montré toute leur implication et leur détermination, offrant des prestations qui ne sont pas loin d'être à la hauteur du pourtant meilleur duo d'Europe: Vidic – Ferdinand.

La jeunesse anglaise se situe du côté de Carrington, plus que jamais, Cleverley et Young ayant eux aussi réalisés des performances dignes des plus grands. Ce fut plus dur pour un autre joueur, mexicain mais adopté par tous les fans anglais, Chicharito, qui n'arriva pas à utiliser sa traditionnelle vitesse et sa capacité d'appel pour ajouter sa pierre à l'édifice. Il faudra très certainement lui laisser du temps pour qu'il retrouve son niveau et son importance de la saison dernière. Une prestation mitigée pour lui même si, sans quelques mauvais choix de la part des deux anglais cités plus haut, il aurait pu lui aussi ouvrir son compteur buts pour la saison 2011/2012. 7-2, disions nous, le score était déjà trop beau pour être vrai, mais ce n'était pas fini. Young, comme en première période, termina le travail sur une nouvelle frappe pleine de puissance et de précision, que les Gunners regardaient filer vers les buts, d'un oeil de spectateurs. Spectateurs d'un véritable récital, c'est le cas de le dire. L'ivresse de la victoire parcourait le corps de chaque supporter et l'ambiance était mémorable dans notre antre. L'histoire venait d'être écrite.

BILAN :

8-2, il ne faudrait pas en dire beaucoup plus pour résumer un match qui a vu l'éclosion au grand jour de jeunes joueurs déjà très en réussite depuis le début d'année. Plus marquante que n'importe quelle autre victoire, celle-ci reflète le gouffre béant qui sépare Ferguson de Wenger, Manchester United d'Arsenal. Les maîtres face aux enfants, amoindris certes, mais aussi dépassés les uns que les autres. La saison prend un premier tournant, et celui-ci voit United virer en tête, comme souvent, que dis-je, comme toujours.


Les groupes :

United : De Gea, Smalling, Jones, Evans, Evra, Anderson (Giggs, 68’), Cleverley, Nani (Park, 68’); Young, Rooney, Welbeck (36’).
Arsenal : Szczesny, Jenkinson, Djourou, Koscielny, Traore, Coquelin (Chamberlain, 62’), Ramsey, Rosicky, Walcott (Lansbury, 84’), Ashavani, Van Persie (Chamakh, 84’).

Les buteurs :

United : Welbeck (22’), Young (28’, 92’), Rooney (41’, 64’, 82’), Nani (67’), Park (70’).
Arsenal : Walcott (45’), Van Persie (74’).

Les cartons :

Jaunes : Arshavin (Arsenal, 15'), Young (United, 26'), Evans (United, 26'), Djourou (Arsenal, 63').
Rouges : Jenkinson (Arsenal, 77').


Article écrit par Best_07

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