L'heure de gloire du manager

Gardien légendaire de United, Peter Schmeichel explique pourquoi les évènements de la finale de la Champions League du 26 mai 1999 sont une conséquence directe d'une mentalité instillée à l'équipe par Sir Alex…


"J'ai revu la finale plusieurs fois depuis cette soirée-là. Le sentiment qu'on avait au terme du match, c'est qu'on n'a pas bien joué, et j'ai toujours pensé qu'on avait fait un mauvais match."

"Mais en le regardant, je trouve qu'on a plutôt bien joué et qu'on s'est créé pas mal d'occasions, ce qu'on a tendance à oublier. Notre équilibre était mis à mal, parce qu'on était privés de Keane et Scholes, alors on avait dû faire jouer Ronny Johnsen et David Beckham au milieu de terrain. Ce sont de très bons joueurs, mais ça a perturbé l'équilibre de l'équipe forgé au fil de toute une saison."

"On s'est fait surprendre dès l'entame. Je me disais que ça aller bien se passer, qu'on allait trouver la faille à un moment donné, parce que le Bayern Munich faisait preuve de beaucoup de suffisance. Ils menaient 1-0 et ne cherchaient pas à marquer un deuxième but. Alors on s'est dit qu'on allait obtenir quelque chose. Et c'est alors que sont arrivées les trois dernières minutes, quoi ont été tout bonnement incroyables."


Continuer envers et contre tout

"Quand je suis monté sur le corner à la fin, plusieurs personnes qui regardaient le manager qu'on dit qu'il essayait de me faire revenir dans les buts. Je n'y crois pas, parce que ça ne lui ressemble pas. C'est la manière dont on avait été entraînés, et c'était la mentalité de toute la structure de Manchester United. Et c'est encore le cas. On ne baisse jamais les bras : ça prend longtemps d'user une équipe, de la fatiguer."

"Mais une fois qu'on arrive à ce point, c'est là qu'on commence à jouer. Ça prendre parfois 88 minutes, mais il vous reste encore les 2 dernières à jouer, plus le temps additionnel, pour remporter le match ou recoller au score. On avait obtenu plusieurs résultats de ce genre pendant la saison. Prenons la Juventus, Old Trafford : on était menés 1-0 à une minute de la fin, et Ryan a marqué. Il y avait aussi eu Liverpool, ici, en FA Cup : ils menaient 1-0 et on les a battus 2-1."

"Si on arrivait à arracher ces résultats, c'est à cause de cette mentalité - et elle est toujours là. C'est ça qu'on doit faire, quand on joue sous les ordres de Sir Alex. Il veut que vous vous battiez jusqu'à la fin, car un match n'est jamais terminé jusqu'au coup de sifflet final."


À l'abordage de la surface du Bayern

"Je ne suis pas vraiment monté pour marquer. J'y suis allé pour mettre le bazar. Sur un corner, tout le monde sait quel joueur il doit marquer... et d'un coup, il y a gars de 1,93 m qui déboule, et sur qui personne n'a été mis. Ça crée un peu de confusion, et c'est ce qui s'est passé contre le Bayern Munich."

"On a créé de la confusion au sein d'une défense très bien organisée. On voit le nombre d'erreurs qu'ils commettent sur cette action. Ils ne dégagent pas le ballon, du coup il arrive sur Ryan, et ils ne marquent jamais Teddy. Quand on regarde le match, on voit combien ils ont été bien organisés tout du long : il faut donc créer de la confusion, et si on a marqué, c'est parce qu'ils étaient désarçonnés. Ils n'ont pas réussi à se recadrer sur les consignes qu'ils avaient reçues avant le match. C'est typique des équipes que construit Sir Alex Ferguson."


Mais avant cela, il y eut Villa Park...

"Je n'ai jamais disputé de meilleurs matches de ma vie que les deux demi-finales de FA Cup contre Arsenal en 1999. Tellement de suspense, tellement d'évènements... Et la conclusion de cette confrontation, le but de Ryan, c'était juste incroyable. Quand on y repense, on était vraiment très proches, avec Arsenal : quasiment rien ne nous séparait. Tout le monde disait que celui qui remporterait ce match gagnerait tout."

"Et plus le match est important, plus Sir Alex est détendu. Il n'y a pas grand-chose à dire. Avant le match, il vous donne les consignes, on sait exactement comme jouer contre Arsenal. L'important, c'est l'approche individuelle, parce qu'on sait chacun ce qu'on doit faire. Il crée une ambiance incroyable autour de ces matches. Il vous fait croire que ce sont ces matches que vous voulez vraiment jouer, et que donc ça n'a aucun sens d'être nerveux. De ce côté-là, c'est un vrai génie."


1 sur un milliard

"Tout le monde sait qu'il a un caractère bien trempé, qu'il est impitoyable. Mais la vérité, c'est qu'il aime les gens : je crois que c'est ça, son secret. Il s'intéresse aux autres et aux histoires. À ce qu'il s'est passé dans ta vie, de quel milieu tu viens. Je l'ai déjà vu dans des situations où il retrouvait des personnes qu'il n'avait pas vu pendant plus de 20 ans. Il se souvenait de leur visage et de leur nom. Je crois que c'est un véritable talent, et que sans ça, il n'aurait pas duré aussi longtemps qu'il l'a fait."

"Quand on réfléchit à ce qu'il a réussi ici, c'est incroyable. Quand je le vois maintenant, 20 ans après mon arrivée au club, il a la même énergie, c'est la même personne et il se ménage toujours aussi peu. C'est fabuleux qu'une personne puisse faire ça si longtemps. Un homme comme lui, on en trouve 1 sur un milliard. Celui qui reprendra le flambeau après lui verra ce que ça signifie. Pour le moment, on est tellement habitués à ce qu'il soit là et qu'il obtienne des résultats... Il bâtit une équipe invraisemblable."

Sur le forum