Évra : "Ma saison la plus dure"

Le final malheureux de dimanche a clôturé la saison de Barclays Premier League 2011/12 sur une dernière fausse note pour Patrice Évra.


À bien y réfléchir, il ne pouvait en être autrement de cette campagne, qu'il décrit comme la plus rude de sa carrière. "Il y a eu beaucoup de périodes difficiles", explique-t-il, le regard las en hochant la tête.

"Avant le match contre Manchester City en octobre, mon père m'a appelé pour me dire que mon frère était décédé. Il n'y a rien de plus difficile à surmonter avant un gros match. Et puis, il y a aussi eu l'affaire Luis Suarez."

"Je sais qu'un joueur de Manchester United ne devrait pas se réfugier derrière tout ça après la perte du titre. On pourrait penser que je cherche des excuses. Mais c'est la vérité. Je ne veux pas mentir. Cette année a été très compliquée."


La fameuse "affaire Luis Suarez" a été très éprouvante pour Évra, qui a rapporté les propos racistes dont il a été victime de la part de l'attaquant de Liverpool à Anfield. La FA a ouvert une enquête disciplinaire à l'encontre de l'Uruguayen, finalement sanctionné de huit matches de suspension. Mais la procédure a duré plus de deux mois, au cours desquels la crédibilité d'Évra n'a cessé d'être remise en cause.

Lors de son retour à Anfield au 4e tour de la FA Cup, en janvier, il a été copieusement conspué par les supporters locaux 90 minutes durant. Puis Liverpool est venu à Old Trafford en championnat, seulement cinq jours après la fin de la suspension de Suarez, lequel a jeté de l'huile sur le feu en refusant de serrer la main d'Évra lors du protocole d'avant-match.

"C'était une période très délicate", se souvient le Français. "Surtout pour ma famille. C'était dur, très dur."

"Je crois que je n'ai jamais ressenti autant de pression que lors de ce match à Old Trafford. Tout ça pour une poignée de main. Pour moi, c'était très difficile d'accepter de lui serrer la main. Je pense que beaucoup ne l'auraient pas fait. Mais j'ai essayé et il a refusé. Je me suis vraiment demandé ce qui clochait chez lui."

"Mais je ne devais pas exploser. Après, on voit le premier tacle, avec Rio Ferdinand [sourire]. Si j'avais chopé Suarez, j'aurais pris un carton rouge et j'aurais dû quitter la pelouse."


Un match qui sentait la poudre est devenu irrespirable suite au refus de Suarez, mais la rancune a duré jusqu'au coup de sifflet final, quand Évra a ostensiblement fêté le succès de United devant la tribune de Stretford End (et, disons-le sans détour, sous le nez de Suarez). Les joueurs de Liverpool n'ont pas apprécié et les deux camps ont dû être séparés par les stadiers.

Sir Alex Ferguson a reconnu après coup que Patrice "n'aurait pas dû faire ça", mais Évra révèle, pour la première fois depuis l'incident, que cette explosion de joie lui a servi d'exutoire public, afin d'évacuer toute la tension née de ces longues semaines de procédure où il devait garder le silence.

"Les gens ont cru que ma célébration à la fin du match contre Liverpool était dirigée contre Suarez", précise Évra. "Mais c'était bien plus que ça. Enfin, je pouvais remercier mes partenaires."

"Je sais que, ce jour-là, ils jouaient tous pour Manchester United, mais aussi un peu pour moi. C'est ce qui explique mes manifestations de joie. Ce que j'ai traversé cette année – sur le plan personnel – a été très dur. Mais j'ai continué à jouer."

"Dans l'existence, on vit des expériences, bonnes ou mauvaises. Mais le plus important, c'est la manière de réagir, et je pense avoir bien réagi. J'en suis fier. On peut me critiquer et me faire beaucoup de reproches, mais je suis désormais plus fort que jamais sur le plan mental. Cette année a été un gros défi, un défi personnel avec moi-même."

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