Manchester United : English pride ?

La jeunesse anglaise du club a-t-elle les moyens de le faire briller dans un futur proche? À l'aube d'une saison aussi incertaine qu'excitante, cette question est l'une des innombrables interrogations qui entourent le United new look de David Moyes.


Pour beaucoup, quand il s'agit de songer aux joueurs anglais de Manchester United, les noms qui reviennent sont Rio Ferdinand, Michael Carrick ou encore Wayne Rooney. Soit des joueurs qui sont tous plus ou moins trentenaires et qui sont des figures fortes du club depuis des années. Chacun leur secteur de jeu, chacun leur rôle lors des derniers succès de Sir Alex Ferguson. Avec l'arrivée de David Moyes à la tête de l'équipe, si la passation de pouvoir n'est pas drastique - pas d'énormes chamboulements d'effectif -, nul doute qu'une nouvelle ère s'installe. Cette dernière devrait voir définitivement le jour à la rentrée 2014.

Cette transition peut-elle s'effectuer avec les jeunes joueurs déjà présents au club et, surtout, l'ossature anglaise se trouve-t-elle déjà dans nos rangs ou faudra-t-il aller la chercher ailleurs ? Dans un marché des transferts devenu aussi impertinent que surréaliste, la première option s'avère la plus alléchante. Les doutes sont pourtant nombreux et tous ne croient pas en ces jeunes pousses anglaises qui composent notre effectif. À 48h du coup d'envoi officiel de cet exercice 2013/2014, c'est l'occasion pour nous de passer en revue ces joueurs qui ne font pas encore l'unanimité et qui pourraient, pourtant, être les plus décisifs dans les premières années moyesiennes.

Ben Amos : un numéro 2 de luxe ?

Ben Amos est un gardien qui est au club depuis plus d'une décennie. Il n'a pourtant que 23 ans. Il a fait toutes ses classes dans l'académie et cela fait maintenant plusieurs saisons que nous nous sommes habitués à le retrouver dans certains matchs de coupes. Il est pourtant difficile, à l'heure actuelle, de le considérer comme un réel membre du groupe pro, tant ses apparitions sont sporadiques et la route barrée par le duo David De Gea/Anders Lindegaard.

S'il semble évident que le gardien espagnol sera notre titulaire indiscutable pour de nombreuses saisons, la position de numéro 2 est plus incertaine. Le gardien danois, plus âgé que les deux autres, aspire à du temps de jeu régulier, et a vraisemblablement le niveau pour le mériter. Cela ne devrait donc pas être une énorme surprise que de le voir quitter le club, lors de ce mercato ou au suivant. C'est alors qu'Amos pourrait s'affirmer encore plus au sein de cette hiérarchie jusque-là tripartite. Attaché au club, discret et professionnel, le rôle de numéro 2 pourrait lui convenir à merveille. Un rôle qui, nous le savons tous, n'est pas toujours évident à endosser (Tomasz Kuszczak).

Sans être une pièce majeure de l'effectif, il pourrait assurer une certaine stabilité au sein du groupe. Chose importante dans ces années floues qui nous attendent. Et puis, qui sait, il pourrait même parvenir à tirer son épingle du jeu si, dans quelques saisons, De Gea n'arrive plus à résister aux sirènes barcelonaises ou madrilènes.

Chris Smalling/Phil Jones : la charnière du futur ?

Les espoirs étaient hauts placés en 2011, suite aux recrutements de Chris Smalling et Phil Jones, respectivement au mercato d'hiver et d'été. Il avait même fallu débourser près de 20 millions d'euros pour s'attacher les services du blondinet de 19 ans. Ce qui avait enthousiasmé les fans, avant même de les voir évoluer sur un terrain, c'était leur mentalité de gagnants. Phil Jones disait bien, en évoquant l'intérêt d'Arsenal, que s'il voulait continuer à ne pas gagner de trophées, il n'avait qu'à rester à Blackburn. Un franc-parler qui ne pouvait que plaire. Nous le voyions même, lors de son premier match en championnat (14 août 2011 sur la pelouse de West Bromwich Albion), motiver hargneusement David De Gea.

Leur mentalité (moins visible chez Smalling), leur polyvalence et leur rudesse nous laissaient penser qu'ils pourraient former une charnière digne, dans plusieurs années, de celle formée par Rio Ferdinand et Nemanja Vidic. Deux ans et dix blessures plus tard, l'enthousiasme est quelque peu retombé. Smalling a passé plus de temps sur le côté droit de la défense, et Jones a été décevant dans une position où certains attendaient énormément de lui (au milieu de terrain). C'est finalement celui en qui l'on ne croyait plus, Johnny Evans, qui s'est imposé comme la troisième solution en défense centrale, comblant les blessures à répétition du "serbe d'acier".

L'heure pourrait être au pessimisme quant à cette doublette qui nourrissait tant d'espoirs. Cependant, à 23 et 21 ans, ils ont toute leur carrière devant eux. Et c'est ainsi sous les ordres de David Moyes qu'ils vont devoir franchir un cap. Les occasions ne manqueront pas de se présenter et c'est à ce moment-là qu'ils devront montrer si, oui ou non, ils ont la carrure pour arriver là où on les attendait.

Tom Cleverley : le nouveau Scholes ?

Bien sûr nous sommes toujours tentés de comparer, d'assimiler, des anciennes gloires de United avec de nouveaux visages. Nani était le nouveau Ronaldo, Hernandez le nouveau Solskjaer et Cleverley le nouveau Scholes. C'est un phénomène normal. Même si la comparaison entre le rouquin et Cleverley, hormis pour le gabarit, ne semble pas très pertinente. Scholes, en fin de carrière, était un adepte du jeu long et pouvait, à lui seul, dicter le tempo d'un match. Tom lui est un adepte du jeu court et a une influence bien moindre sur le rythme d'une rencontre.

Il n'empêche qu'il joue au même poste, et qu'il a accompagné Carrick durant cette saison 2012/2013 comme le "ginger prince" pouvait le faire auparavant. Nous sommes ainsi en droit d'attendre de lui qu'il soit un atout précieux dans l'entre-jeu, tel que pouvait l'être le légendaire numéro 18. À quatre jours de son 24ème anniversaire il n'a toujours pas réussi à convaincre, sur la durée, malgré ses qualités indéniables. Au point que Moyes envisage très certainement de recruter Marouane Fellaini pour faire du jeune anglais, au même titre qu'Anderson, un joueur de rotation.

Est-ce que c'est ce qu'il peut espérer de mieux ? La réponse reste ouverte. Ce sera à lui de la délivrer sur le terrain, et à Moyes d'y réagir. Il y a néanmoins un vrai talent, chez ce joueur, qu'il serait dommage de brider.

Wilfried Zaha : le numéro 7 de David Moyes ?

Wilfried Zaha, auteur d'une pré-saison épatante, est peut-être la véritable recrue phare de ce mercato estival. Certes l'ancien joueur de Crystal Palace a été recruté en janvier dernier par Ferguson et n'est donc pas un recrutement moyesien. Il y a pourtant une complicité qui semble s'être créée entre les deux hommes. L'écossais donne l'impression de vouloir faire du joueur son alter égo sur le terrain, à la manière de Ferguson avec Ronaldo. Le mot est peut-être trop fort mais Moyes, dans ses diverses déclarations, laisse clairement entendre qu'il compte en faire l'une de ses principales armes dans le futur.

Ce serait une manière de lancer dans le grand bain un joueur qui n'a jamais foulé la pelouse d'Old Trafford sous le maillot rouge. Lui permettant, sans doute, de sortir un tant soit peu de l'ombre de celui qui a une statue et une tribune à son nom. D'imaginer Zaha en numéro 7 de United est un pur fan-tasme, pour l'heure, mais entre ce qu'il a montré lors de ces quelques matchs de préparation, et le niveau actuel de nos ailiers, le fantasme ne peut qu'être nourri.

En tout cas, l'évolution du club et sa pérennisation doit passer par une confiance absolue en ce jeune joueur qui laisse entrevoir tous les attributs d'une superstar. Et ça, David Moyes le sait.

Danny Welbeck : buteur ou moteur ?

Le problème de Danny Welbeck, régulièrement moqué pour sa maladresse dans le dernier geste, c'est qu'il est un attaquant doué, dès lors qu'il ne joue pas attaquant. C'est sur l'aile, dans une position d'ailier-axial, qu'il a fait ses meilleures prestations en Premier League. Sous le maillot mancunien, mais aussi sous le maillot des Black Cats, où il avait été prêté pour une saison entière en 2009/2010.

Pas assez buteur (une réalisation en championnat en 2012/2013), un rôle de dynamiteur en partant de plus loin semble mieux lui convenir. Il est à-même de faire parler, en étant plus libéré, sa vitesse et sa capacité de percussion, en plus de pouvoir servir de point d'appui idéal. Ferguson semblait l'avoir compris, l'ayant utilisé de cette façon à partir de janvier dernier (pour ce qui reste sa demi-saison la plus complète au club).

David Moyes, lui, est plus hésitant. Il a essayé le jeune anglais à la fois en attaquant, second attaquant et ailier-axial durant la tournée asiatique. Reste à savoir les conclusions qu'il en a tiré et le rôle qu'il compte donner à Welbeck, un joueur en qui il semble beaucoup croire.

Le bébé d'Old Trafford a toute de même montré assez de belles choses pour qu'on puisse l'imaginer avoir une riche carrière, ou au moins l'espérer.

Aucun de tous ces joueurs-là n'est pour l'instant un cadre de l'effectif. Seule la réalité du terrain leur permettra de le devenir ou non. Toujours est-il qu'il est important pour l'institution (supporters compris) de développer de jeunes talents anglais et d'essayer de constituer, avec eux, une ossature à la fois équilibrée et talentueuse. Là est tout le défi de David Moyes, qui reprend les cartes léguées par Ferguson. De constituer, à partir de son héritage, une génération dorée teintée britannique. On ne peut qu'avoir envie d'y croire, parce que Manchester sans anglais, ce n'est pas United, c'est City.

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